Bullshit Jobs ou sentiment d’inutilité au travail ?

Après le succès mondial de l’ouvrage Bullshit Jobs[1], une croyance émerge : une grande partie…

Après le succès mondial de l’ouvrage Bullshit Jobs[1], une croyance émerge : une grande partie de nos emplois seraient des “travails à la con”, socialement et économiquement inutiles. Selon l’auteur, notre société capitaliste fabriquerait des professions vides de sens… et donc des pôles de coûts superflus. Ne faudrait-il pas plutôt questionner le sentiment d’inutilité au travail ? Réflexion.

Le brown out[2] est récemment apparu comme nouveau syndrome de mal être au travail. Il désigne une perte de motivation chez le collaborateur due à l’absurdité des tâches confiées par l’employeur. Certains psychologues du travail parlent de “démission intérieure.” Un effet de mode ? Peut-être, puisque le brown out est une des conséquences d’un phénomène observé depuis des années. Celui que, David Graeber, appelle “bullshit jobs”.

Cet anthropologue de la London School of Economics, a établi depuis plusieurs années, qu’environ 40% des emplois de nos sociétés, aux économies tertiarisées, sont constitués de tâches inutiles et peu intéressantes. Son best sellerBullshit Jobs, sorti à la rentrée 2018, a installé sa théorie au centre des débats sociétaux de ces derniers mois. L’approche empirique de l’auteur, très orientée vers une hypothèse posée comme inaliénable, jette un premier doute sur la rigueur de sa démarche. De plus, D. Graber, s’appuie largement sur un sondage de Yougov publié en 2015, dans lequel 37 % des répondants estiment que leur travail est socialement inutile. La question posée ? “Pensez-vous que votre travail apporte une contribution significative au monde ?” Une question qui reprend la notion “d’utilité” et met les personnes interrogées face à des doutes existentiels qui sortent du cadre de la recherche. 

Nb : Au-delà de la notion subjective “d’utilité du travail”, la question que pose la somme de témoignages du chercheur britannique est davantage celle du sentiment d’utilité, du besoin de sens de l’individu au travail et la façon dont l’organisation peut l’alimenter. Le défi est de taille.

En effet, la fonction RH fait désormais face à un paradigme générationnel exigeant sur ce plan. Nous le savons, les besoins de la majorité des millenials[3], comme celui de s’accomplir, viennent souvent se loger directement au dernier étage de la pyramide de Maslow. Pourtant, l’accumulation croissante des process et intermédiaires éloigne le salarié de la finalité de son action. Les conséquences ? Perte de sens chez le collaborateur, faible taux d’engagement au sein de l’organisation et augmentation des coûts cachés[4] pour l’entreprise.

Alors, comment procurer un véritable sentiment d’utilité chez vos collaborateurs ? Une chose est certaine, il faut cesser de renvoyer l’individu à lui-même dans la gestion de ses prétendues insuffisances. (Re)-définir la raison d’être de l’activité et des fonctions peut-être une première étape. Ainsi, en la communiquant judicieusement vous ferez croître le sentiment de contribution des salariés au projet global.

Via l’impact de sa communauté, l’individu peut trouver du sens à son action. Le sentiment d’utilité directe au sein de cette communauté émergera de la mise en évidence de celle-ci mais également de son rappel régulier, selon votre organisation, des interactions qui s’y créent et de la culture qui en résulte.  Reconnaissance, écoute, feed-back, management participatif et capacitant etc. … font partie des ingrédients.

A vous de trouver la bonne recette ! 🙂

[1] Auteur : David Graeber Editeur : Les liens qui libèrent

[2] Littéralement « Panne de jus », coupure de courant. Brutal manque d’énergie au travail due à l’absence de sens. 

[3] https://www.linkedin.com/pulse/les-enjeux-de-la-marque-employeur-face-aux-lgp-conseil/

[4]https://www.linkedin.com/pulse/108-milliards-deuros-les-co%C3%BBts-cach%C3%A9s-dun-mauvais-lgp-conseil/?